Aujourd’hui, le média jeu vidéo est marché qui se porte bien. Qui se porte même très bien. Régulièrement on nous annonce de très gros jeux, très ambitieux et qui aspirent notre âme pendant des centaines d’heures. Que ce soit des open worlds avec beaucoup de choses à y faire, des titres plus narratifs qui nous racontent des histoires qui n’ont plus rien à envier au cinéma. Le jeu vidéo fait désormais parti de nos divertissements. Il même devenu grand public et s’adresse à tout le monde.
On l’a bien vu lors des confinements, le jeu vidéo était le média vers lequel une grande majorité de personnes se sont tournées. Dès que l’on a du temps pour soi, on joue. À tel point que, de nos, jours c’est l’un des divertissements préférés des français. Une chose qui est aussi vraie dans la plupart des pays développés.
En un peu plus de 50 ans, le jeu vidéo est aussi devenu bien plus abordable qu’à ses débuts. Même si cela reste un luxe, il faut bien comprendre que la diversité des offres aujourd’hui permet à de nombreuses personnes de jouer. Que ce soit les titres freemium sur mobile, les jeux offerts et les soldes sur certaines plateformes ou encore la démocratisation du marché de l’occasion. Il n’a jamais été aussi facile de se procurer des jeux. Même si ces 80€ devenu la norme pour les grosses nouveautés font grincer des dents. Si on y regarde de plus près, on se rend rapidement compte que les boutiques qui pratiquent ces tarifs sont rares et les prix redescendent assez vite quelques mois après la sortie.
On peut aussi évoquer la scène indépendante qui offre de très nombreuses expériences et bien souvent à un tarif très compétitif. Des jeux qui ne demandent pas toujours des machines ultrapuissantes. Il y a aussi ces titres free-to-play comme Fortnite ou Genshin Impact qui promettent des heures de jeux sans débourser le moindre centime.
Tout ça pour dire que le jeu vidéo ne s’est jamais aussi bien porté mais saviez-vous que les choses auraient pu être autrement ? Que le jeu vidéo aurait bien pû disparaitre sans que ça n’inquiète personne.
Dans le milieu des années 70, c’est ATARI qui est la locomotive de toute l’industrie. Le succès de l’ATARI 2600 sorti en 1977 fait beaucoup de bruit. Tous les foyers veulent s’en équiper. C’est le nouvel El Dorado du monde de l’électronique. À un moment où la micro-informatique personnelle n’en est qu’à ses débuts et n’attire qu’une poignée de barbus intrigués, le jeu vidéo quant à lui arrive à se faire une place chez les particuliers.
Un tel ras-de-marré que de nombreuses sociétés se lanceront dans le développement de jeux vidéo. Selon moi, l’évènement le plus marquant c’est la sortie de Space Invaders qui sera un succès planétaire. Une popularité qui donnera naissance à des studios comme ceux d’Activision très attiré par ce marché en train d’exploser.
Mais voilà, une telle opportunité commerciale attire beaucoup d’entreprises sans scrupule. Et c’est comme ça que le marché se retrouvera inondé de milliers de jeux sans saveur pour ne pas dire nuls lorsqu’il ne s’agissait pas carrément d’arnaque. On peut citer le jeu « Charlotte aux Fraises » qui n’était qu’une image fixe du personnage et c’est tout. Ce truc était bien vendu en boutique.
Toutefois le plus gros symbole de cet abondance de mauvais jeux, c’est E.T. sorti en 82 et qui sera l’un des plus gros flop de l’histoire. Bien qu’on l’accuse d’être le pire de jeu de tous les temps, la vérité c’est qu’il y avait des choses bien pires sur le marché. E.T. avait au moins un but et une fin…
Quelques mois plus tard, ATARI accuse une baisse de revenu de 260 millions de dollars sur un trimestre. Le jeu vidéo ne se vend plus très bien notamment à cause de cette surabondance de mauvais titres qui ne font pas une bonne publicité au média.
La débâcle commence réellement à la fin de l’année 1982. Les revendeurs retournent leurs cartouches invendues chez ATARI et on assiste à une crise sans précédent dans le secteur. Plus personne ne veut jouer aux jeux vidéo. La mode est passée.
En 83, ATARI commence à fermer certaines divisions notamment celles qui étaient dédiées à l’international. Petit à petit, l’entreprise connait des difficultés et annonce officiellement ses problèmes financiers à l’été de cette même année. Il ne faudra pas attendre longtemps pour que ce soit le marché tout entier qui s’effondre quelques mois plus tard.
Avec l’explosion de la micro-informatique, c’est Commodore qui reprend l’entreprise puis fera le ménage dans les effectifs et restructurera ATARI dont l’intérêt ne résidait plus que dans quelques licences populaires.
À ce moment là, beaucoup pensaient que ça en était terminé pour le jeu vidéo. Ce jouet pour enfant aura été une mode et on pensait passer à autre chose. C’était le début de l’arrivée des micro-ordinateurs dans les foyers. Les rares copies de jeux ne se vendaient plus que sur ces machines qui étaient loin d’être partout. D’autant plus que le piratage était plus ou moins la norme. Ca n’était plus qu’un petit marché de niche destiné à une poignée de passionnés.
L’histoire aurait pu s’arrêter là mais ce qui a changé la donne, c’est l’arrivée de la NES en 1985. Alors que plus personne ne croyait aux jeux vidéo, Nintendo avait bien compris qu’il y avait là un sujet à creuser. Il faut bien avouer que c’était courageux de se lancer dans cette aventure alors que tout était en train de s’effondrer autour d’eux.
Afin de ne pas répéter l’erreur d’ATARI, Nintendo imposera son SEAL of QUALITY. Un label obligatoire pour tous les jeux portés sur sa console. La marque ne publiera que des titres de qualité sur la NES. Les développeurs et les éditeurs devront aussi faire un petit chèque au géant nippon afin d’avoir le droit de publier leurs jeux sur cette machine. Une chose qui limitera les tentatives d’arnaques et le label ainsi imposé, le marché ne sera plus inondé de jeux insipides.
L’idée fonctionne et la NES devient rapidement un gros succès. SEGA leur emboitera le pas avec la sorti de la Master System fin 90. La machine était relancé !
Je ne vais pas vous refaire l’histoire après ça mais ce qu’il faudra surtout retenir, c’est que sans Nintendo et son SEAL of QUALITY, l’industrie du jeu vidéo aurait bien pû disparaitre définitivement.
Aujourd’hui, se pose la question de l’avenir du média. Si nous sommes dans une période très euphorique pour le jeu vidéo, rien n’indique que ce sera toujours le cas. Toutefois l’industrie a un peu appris de son histoire.
Mais avec le tout dématérialisé, les jeux services et les microtransactions, on peut légitiment se demander si la direction que prend notre divertissement préféré ne pourrait pas avoir, à l’avenir, des conséquences désastreuses. Lorsque nous n’aurons plus d’autre choix que d’acheter nos jeux à 80€ sur des plateformes qui imposeront leurs prix ou quand il faudra obligatoirement prendre un abonnement pour jouer. On peut se demander si le grand public ne se détournera pas du média.
Une autre crise du jeu vidéo reste possible. À force de trop tirer sur la corde, on pourrait bien voir toute une industrie s’effondrer à nouveau.